mardi 29 novembre 2011

Interview avec Paul Beorn

Peux-tu nous présenter ton parcours ?

Je savais que je voulais devenir écrivain, depuis tout petit. C’était un projet à très très long terme. Je devais avoir cinq ans, je ne savais pas encore écrire. Mes parents me lisaient Bilbo le Hobbit, et je me suis dit : moi aussi je veux écrire un roman comme ça. J’ai fait des études sans trop savoir ce que je voulais faire, parce que je voulais être écrivain, et les études n’existaient pas pour ça. On m’avait dit, écrivain, ça ne te nourrira pas. Donc soit je me mariais avec une femme riche, soit je devais avoir un travail. J’ai choisi un travail qui me permettait d’écrire. C’est tout de même un travail prenant, mais pas un poste de direction, ce qui me laisse les week-end libres. J’ai fait une hypokhâgne, mais je ne voulais pas être prof. Je suis passé en khâgne, et j’ai fait Sciences Po à Bordeaux, puis une année de prépa à l’ENA. Ça m’a permis de choisir un travail dans l’administration qui me plaît vraiment. Je suis inspecteur de la répression des fraudes. Je recueille les plaintes des consommateurs et je vais voir sur place. C’est un travail très varié, qui se fait surtout sur le terrain. C’est une source d’inspiration formidable.

Tu travailles à mi-temps ?

J’ai travaillé à temps plein jusqu’à récemment, là j’ai pris un quatre-vingt pour cent, ce qui me laisse une journée par semaine pour écrire. J’écris la nuit, aussi.

J’aimerais que tu nous parles de ton fameux blog : quand est-ce que tu as commencé, et pourquoi ? Qu’est-ce que ça t’a apporté ?

Il y a un an, deux ans. À l’époque, je cherchais des conseils d’écriture. J’ai cherché sur Google et j’ai trouvé pas mal de choses, mais peu qui soient intéressantes. Je me suis dit : maintenant que j’ai appris des choses, je vais essayer de donner des conseils qui pourraient servir, et que j’aurais aimé trouver à l’époque où je commençais.

J’ai moi aussi cherché. En France en tout cas, rien ni personne ne nous apprend à écrire. On est obligés d’apprendre sur le tas. J’ai trouvé que du coup, ton blog était très instructif. Je crois que c’est l’un des seuls qui existent sur le web ?

Je ne le dirai pas, parce que je ne veux pas céder à la concurrence (rires). Après, on est plus sensibles à certains conseils que d’autres. C’est bien qu’il y en ait plusieurs. Mais c’est vrai qu’il n’y en a pas tant que ça, des blogs vraiment intéressants.

Est-ce que tu penses que ce type de blog est plus développé dans les pays anglo-saxons ?

Je ne sais pas trop. Ce que je sais par contre, c’est qu’il y a des écoles, notamment aux États-Unis, où on nous apprend à devenir écrivain. On le ressent aussi dans la critique, on sent que c’est des gens qui ont appris à écrire, ils sont moins dans le coup de coeur « j’aime », « j’aime pas ». En France, ça manque, on a l’impression qu’écrire un roman, c’est un travail solitaire, on a le talent ou on ne l’a pas, et il n’y a rien à faire. Pour moi pas du tout. J’ai toujours eu l’impression que j’écrivais mal, et qu’il fallait que j’apprenne. C’est comme un artisanat, ébéniste ou plombier, on apprend en permanence. D’ailleurs, c’est ce qui est passionnant, je n’ai pas fait le tour du sujet.

Tu vois ta publication relativement récente comme un aboutissement de tout ce travail-là ?

Oui, quand j’ai su que j’allais être publié, j’ai considéré ça comme un aboutissement et je me suis aperçu très rapidement que c’était une erreur monumentale : en fait c’est le début de quelque chose de complètement différent, c’est le début d’une nouvelle étape. Comme je le disais, ce n’est pas parce qu’on a publié que ça y est, on sait écrire. Oui forcément, on sait un peu écrire. Mais on a encore énormément de choses à apprendre.

Qu’est-ce que ça a changé, alors ? Ça t’a donné une légitimité, de la confiance en toi ?

Vis-à-vis de moi-même, j’ai toujours eu la conviction intime que j’étais un auteur, que j’étais fait pour ça. C’est peut-être complètement crétin, mais c’est le genre de chose qui ne s’explique pas, et qui porte, qui permet de se dire : « je ne suis pas publié, c’est pas grave, je le serai un jour, et je continue quand même ». Vis-à-vis des autres, ça me permettait de donner des conseils, d’en dire un peu plus , de donner mon point de vue personnel. J’ai écrit un roman, même si les conseils ne conviennent pas aux lecteurs, au moins j’ai cette légitimité, je ne suis plus tout à fait n’importe qui, même si je ne suis pas encore un auteur très célèbre.

As-tu quelque chose d’autre de prévu avec les éditions Mnémos ?

J’ai envoyé un manuscrit il y a trois semaines. J’ai également envoyé un manuscrit pour la jeunesse à un autre éditeur.

Et en ce moment, tu travailles sur quoi ?

Sur le tome 2 du roman que j’ai envoyé à Mnémos. C’est de la fantasy historique, comme dans La Pucelle. Cette fois, la période qui m’intéresse, c’est celle des Cathares. C’est dans un monde qui ressemble à la France des Cathares, mais avec de la magie. Les Cathares ont survécu à la croisade grâce grâce à des forces occultes dont on va essayer de découvrir la nature.

Pourquoi est-ce que tu as choisi la fiction pour aborder ces sujets, pourquoi utiliser le biais de l’imaginaire ?

D’abord, ce n’est pas une obligation. Je pourrais écrire autre chose, et d’ailleurs j’ai commencé par autre chose, parce que j’ai fait une hypokhâgne, que ce n’est pas une littérature que mes copains lisaient et que ce n’est pas considéré comme sérieux. Après vingt ans, tu te dis qu’il faut lire des choses sérieuses. Heureusement, un copain m’a offert un roman de fantasy, et je me suis dit que la fantasy était un moyen de dire des choses que je ne pouvais pas dire avant. Ce qui me plaît aussi, c’est le roman d’aventure. Et pour écrire un roman d’aventure, à part le policier, dont la forme ne me convient pas, ce n’est pas possible autrement que par le biais de l’imaginaire. Ça permet de dire plein de choses sur notre monde tout en étant beaucoup moins lourd, parce qu’il y a un décalage, une interprétation, on parle par métaphore. On peut le prendre au premier degré, ou voir un peu au-delà, le lecteur fait son choix.

Ce qu’il y a de plus intéressant, c’est donc plus la mise en situation que le parcours d’un individu ?

Quand je commence un roman effectivement, j’ai d’abord une idée, pas un personnage. Mais le personnage apparaît tout seul. C’est complètement lié, je pense.

En combien de temps as-tu écrit La Pucelle ?

J’ai écrit le premier tome en trois mois. J’ai mis deux ans avant d’écrire le deuxième tome. Mais à l’époque, personne ne m’attendait. J’ai écrit un autre roman entre temps, et je m’y suis remis. J’ai mis beaucoup de temps à faire le synopsis. C’est plus dur un deuxième tome, on a déjà le premier, on ne peut pas dire n’importe quoi, partir sur d’autres idées. J’ai mis six mois, un an. J’écris assez vite. Mais une fois que c’est écrit, ce n’est pas terminé. On le fait lire à ses copains, on le corrige. Moi, je suis un correcteur fou. Ce roman, j’ai du le lire 500 fois, je ne peux plus le voir. Je commence juste à pouvoir le relire avec plaisir. Dans mon ordinateur, je dois avoir 150 versions du roman.

Eh bien, merci beaucoup !

Merci à vous !

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